MALAPARTE / Deux chapeaux de paille d’Italie

On dit “le” Malaparte, en parlant du livre de Bruno Bressolin, comme si ce travail, réalisé à partir d’un texte qui ferait moins de dix pages dans un livre de poche, résumait à lui seul toute l’œuvre de l’écrivain. Il y a sans doute du vrai, tant les planches rassemblent d’ironie et de violence, de mort et de dérision avec, au fil des pages des symboles lourds mais qui pourraient sortir d’une main enfantine.
Si la poétique du texte se laisse porter par l’alphabet manuscrit de Bruno, la lecture nous jette sur un itinéraire plus complexe et nous soumet à des rencontres inattendues ; Les réhauts et autres objets rapportés sont comme autant d’outrages à une nostalgie qui ne pourrait être que gracieuse. Ce Malaparte se lit comme un parcours du combattant ou l’exaltation pour une cause pure se heurte à la laideur.
Mais de tous ces maculages naît une esthétique, ponctuée de quelques signes forts comme cette carte d’époque (dénichée en nombre suffisant Dieu sait où) que l’on peut déplier pour s’orienter dans l’histoire, comme ce miroir brisé où l’on pourra craindre d’apercevoir en nous ce qu’il s’agit d’exorciser, ou comme cette cible de carton qui nous rappelle peut-être que le tir n’est qu’un jeu à la fête comme à la guerre.
“Deux Chapeaux de Paille d’Italie”, le titre de ce livre, rapprochent dans la mémoire de Malaparte diverses images de ces coiffures honorables dont on coiffait aussi les chevaux pour les protéger du soleil sur les raides chemins des cimetières. Ces chapeaux de paille encore qu’il voyait tresser aux doigts des femmes de son enfance. Et ce piquet qui signale la tombe de Mussolini avec pour seul chapeau qu’une boîte de conserve retournée, même pas d’Italie d’ailleurs. Ces images se télescopent avec la vision des familles entières qui viennent le dimanche pisser sur la tombe, pour passer l’après-midi comme on irait voir un match de foot.
Né en Toscane, Malaparte s’est enfui de sa famille à 16 ans pour combattre dans l’armée française en 14. Fasciste convaincu en 22, anti fasciste en 31, il restera en résidence surveillée à Lipari de 1933 à 1938. Il sera ensuite correspondant de guerre, ce qui l’amènera à publier Kaput en 44 et La Peau bien plus tard.
Son histoire exceptionnellement violente, Malaparte l’assume en mêlant macabre et drôlerie, cruauté et dérision.
A ce titre, le livre de Bruno Bressolin est un vrai Malaparte qui ne peut qu’inciter à lire tous les autres.

24 planches en sérigraphie en quatre couleurs pleine page avec réhauts sur chaque planche, dont 5 planches de texte calligraphié en français, inclusion d’objets sur certaines pages (carte ancienne d’Italie, miroir brisé, cible de tir en carton...).
L’ensemble constitue l’édition originale sur velin d’arches BFK Rives 270g.
Tirage : 66 exemplaires
Format : 50 X 35 X 3 cm
Emboîtage conçu par l’artiste avec réhaut à l’or et couvercle boîte de conserve imbriquée.

Éditeur/ Imprimeur : Atelier Eric Seydoux